La numérisation au cœur de la grève à Pôle emploi
SNU-FSU, CGT, FO et SUD appellent à la grève ce lundi, mais pas la CFDT.
La direction dément le risque de disparition des 8.800 conseillers indemnisation.
Les demandeurs d'emploi pourraient avoir du mal à contacter leurs conseillers ce lundi à Pôle emploi, conséquence d'un appel à la grève englobant le SNU-FSU, la CGT, FO et SUD. Il s'agit du premier mouvement concernant toutes les catégories de personnel depuis celui de 2009, qui avait alors mobilisé 35 % de grévistes, selon le SNU-FSU. Le contexte - on était alors en pleine fusion ANPE-Assedic - a changé depuis. Il y a donc peu de chances que la mobilisation soit forte, d'autant que la CFDT, premier syndicat maison (19,8 % des voix, contre 47,5 % pour l'intersyndicale), ne s'est pas jointe au mouvement qu'elle qualifie de « contre-productif dans la période ».
Effectifs insuffisants
La mobilisation pourrait toutefois être nourrie par les craintes récurrentes sur la régionalisation de Pôle emploi. Mais aussi par les perspectives tracées par Emmanuel Macron. En cas de victoire, le candidat d'En marche promet certes de renforcer les moyens de Pôle emploi en regard de droits nouveaux, comme l'ouverture de l'allocation chômage aux salariés qui démissionnent. Mais avec une contrepartie, qui reste un sujet sensible auprès des syndicats et des conseillers : l'application d'un contrôle « drastique » des efforts déployés par les chômeurs pour retrouver un travail.
En attendant, c'est sur le plan stratégique 2020 que se concentre la contestation, forte du soutien d'associations comme le Mouvement national des chômeurs et précaires. Effectifs insuffisants, dématérialisation à outrance, réduction du nombre d'agences... « La coupe est pleine », déplore Jean-Charles Steyger, délégué SNU-FSU. Un sujet en particulier cristallise le mécontentement : l'avenir des conseillers indemnisation, chargés des allocations des chômeurs, un métier menacé de disparition, selon l'intersyndicale.
Avec la numérisation, une grande partie du travail de ces 8.800 conseillers - en interne, on les appelle « GDD », pour « gestion des droits » - a été automatisée, ouvrant la voie à d'importants gains en termes de temps de saisie et donc de charge de travail. Le sujet a fait l'objet d'un accord de gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences. Lequel, rappelle Jean Bassères, le directeur général de Pôle emploi, a posé des principes clairs : la direction s'est engagée à vérifier que la baisse de charge est avérée agence par agence avant d'inciter, sur le mode du volontariat, les conseillers à évoluer vers un poste de conseiller emploi.
Ces principes posés, Jean Bassères estime que la quasi-totalité des 3.200 conseillers indemnisation, qui font aussi du placement, devrait basculer, ce qui permettra un meilleur accompagnement des chômeurs. Les 5.600 autres, qui ne font que de l'indemnisation, se concentreront sur le coeur de l'expertise de la gestion des droits. « Le métier évolue et l'indemnisation doit être plus personnalisée », résume-t-il. « Nous ne sommes pas contre la numérisation, rétorque Jean-Charles Steyger, sauf que la direction en fait l'unique voie d'accès à Pôle emploi. » Qui plus est, une grande partie des conseillers GDD ne sont pas faits pour accompagner des chômeurs, prévient-il.
Alain Ruello, Les Echos
source : https://www.lesechos.fr/economie-france/social/0211845458908-la-numerisation-au-coeur-de-la-greve-a-pole-emploi-2069820.php