Réforme des retraites : quel avenir pour les dispositifs de solidarité?
Le document de travail transmis aux représentants syndicaux et patronaux qui se succèdent dans le bureau de Jean-Paul Delevoye, Haut-commissaire à la réforme des retraites, détaille les pistes envisagées dans le cadre de la réforme à venir. En préambule, le texte indique que le système en points permet de "préserver la prise en compte des interruptions involontaires d’activité."
Actuellement, ces périodes non travaillées (chômage, maladie, accident du travail, invalidité, maternité, adoption, service militaire et civique, stage de formation professionnelle, congés de reclassement, sportif de haut niveau, détention provisoire) sont assimilées à des périodes cotisées et permettent de valider des trimestres pour la retraite. Selon le Conseil d’orientation de retraites, 33,6 milliards d’euros de pensions ont ainsi été versées en 2016 au titre de la solidarité (hors réversion) pour le seul secteur privé.
Des droits identiques pour tous?
Selon le Haut-commissariat, les droits liés aux périodes assimilées seraient à l’avenir les même pour tous et financés par un fonds de solidarité universel alimenté par des recettes fiscales ou des transferts provenant des opérateurs de la protection sociale (Unedic pour les périodes de chômage, branche famille, etc…). Les périodes d’inactivité – au minimum de 30 jours – pourraient être prises en compte à condition que les personnes perçoivent un revenu de remplacement, par exemple une allocation chômage ou indemnité journalière.
Pour les périodes de maternité, de maladie et d’invalidité, les droits seraient basés sur les revenus antérieurs à l’interruption de travail. La prise en compte de l’Allocation de solidarité spécifique (ASS), versée aux demandeurs d’emploi ayant épuisé leurs droits au chômage, dépendra "de l’évolution à venir de l’assurance chômage et des minimas sociaux", stipule le document. En effet, Emmanuel Macron a annoncé en septembre 2018 l’entrée en vigueur du revenu universel d’activité qui, à partir de 2020, fusionnera le RSA, les aides au logement et la prime d’activité.
Les minima de pensions toujours inférieurs au SMIC
Autre point important en débat: les minima de pension dont l’objectif est de garantir une retraite minimale aux personnes ayant eu des carrières faiblement rémunérées. Il s’agit dans le secteur privé du minimum contributif (Mico) qui porte la retraite à 1177 euros par mois maximum et qui était perçus en 2016 (derniers chiffres connus) par 16% des retraités du régime général, 15% des retraités du régime agricole non-salariés. L’équivalent pour le secteur public est le minimum garanti (Miga : 1170 euros) versé à 5,4% des nouveaux pensionnés de la fonction publique civile d’Etat et 19,6% des ressortissants de la Caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales.
Le document pointe des disparités entre les régimes (montants, niveau de la garantie) et fait le constat que l’objectif de la réforme Fillon de 2003 de porter les minima à 85% du Smic net n’a pas été atteint. En conséquence, le Haut-Commissariat énonce deux principes: la fixation dans le futur système d’un montant minimum fixé en pourcentage du SMIC, « identique quel que soit le statut, dès lors que la carrière a été complète » et « à un niveau au moins égal à la situation actuelle. » Il propose également que ce nouveau minimum retraite valorise le travail et reste à un montant supérieur à l’Allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), accordée aux seniors ayant peu ou pas du tout travaillé. Le niveau minimum des pensions figure également depuis des années parmi les revendications des syndicats de retraités: ils exigent qu’aucune retraite ne soit inférieure au SMIC net, soit 1201 euros en 2019.
Le Haut-commissariat s’interroge enfin sur le financement du futur dispositif: relèvera-t-il de la solidarité nationale, via le fonds de solidarité universel adossé au système, ou de la solidarité entre actifs, via une cotisation spécifique, non créatrice de droits à retraite ? A suivre.