Dialogue social, contrat de travail, licenciements… La feuille de route 2015 est prête
Révélations. Salariés, voilà à quelle sauce vous serez mangés cette année! L’Humanité Dimanche » s’est procuré le projet du programme national réformes 2015 » que le gouvernement va transmettre à Bruxelles dans quelques semaines. Le Medef peut se lécher les babines !
«Recommandation 2: réduction du cout du travail »: « (…) à réduire encore, d’une manière neutre sur le plan budgétaire, les couts salariaux, en particulier aux niveaux les plus bas de l’échelle des salaires ». « Recommandation 6: marche du travail, dialogue social et formation » : «(…) prendre des mesures supplémentaires pour lutter contre la rigidité du marche du travail et plus particulièrement prendre des mesures pour reformer les conditions des accords de maintien de l’emploi en vue d’accroitre leur utilisation par les entreprises en difficulté; prendre des mesures supplémentaires pour reformer le système d’assurance chômage ». Voila quelques morceaux choisis du projet du « programme national de reformes 2015 » que le gouvernement français va transmettre en mai a la Commission européenne.
Un exercice annuel ou les Etats membres font montre de leurs réalisations de l’année précédente et de leurs engagements pour celle en cours. Tout cela dans le cadre de la stratégie « Europe 2020 » pour « une croissance intelligente, durable, et inclusive » adoptée en juin 2010 par le Conseil européen, soit l’ensemble des dirigeants des Etats membres, dont la France. Cette stratégie s’articule autour de cinq objectifs: accroitre le taux d’emploi, l’effort de recherche et développement et le niveau d’éducation, réduire la pauvreté, préserver l’environnement. Qui pourrait être contre!
L’AUTOSATISFECIT EST TOTAL
Mais les recettes pour y parvenir s’inscrivent dans le cadre des politiques d’austérité que François Hollande s’était engage a remettre en cause lors de sa campagne électorale de 2012, sans même s’y essayer une fois élu. La feuille de route présentée par le gouvernement français pour 2015 vise donc à réduire toujours plus les dépenses publiques et la protection sociale solidaire, à libéraliser et flexibiliser à tout va.
Dans ce projet de programme, le gouvernement français tient d’abord a rappeler a quel point jusqu’ici il a fait le job. II se félicite ainsi que, grâce au pacte de responsabilité et de solidarité, « les cotisations sociales versées par les employeurs (…) soient désormais quasi nulles au niveau du salaire minimum ».
Et qu’en ajoutant le crédit d’impôt pour l’emploi et la compétitivité (CICE) et la non-revalorisation du SMIC, «le cout du travail au niveau du SMIC » ait « progresse moins vite que le niveau moyen des salaires » et soit désormais proche de celui de l’Allemagne.
Jusqu’ici il a fait le job. II se félicite ainsi que, grâce au pacte de responsabilité et de solidarité, « les cotisations sociales versees par les employeurs (…) soient désormais quasi nulles au niveau du salaire minimum ». Et qu’en ajoutant le crédit d’impôt pour l’emploi et la compétitivité (CICE) et la non revalorisation du SMIC, «le cout du travail au niveau du SMIC » ait « progresse moins vite que le niveau moyen des salaires » et soit désormais proche de celui de l’Allemagne.
L’OCDE CONSEILLE LA FRANCE
II rappelle aussi, avec satisfaction, le gel du point d’indice (base de calcul du salaire des fonctionnaires) de la fonction du publique; l’« assouplissement des régies d’ouverture du dimanche » prévu par la loi Macron; la loi dite de « sécurisation de l’emploi» de 2013 qui a permis d’« apporter plus de souplesse et de sécurité juridique aux entreprises » – soit en clair de licencier plus vite et de limiter les recours en justice contre les « plans de sauvegarde de l’emploi». Tous les intéressés apprécieront!
L’OCDE, qui vient de prodiguer ses « conseils » a la France – simplifier et raccourcir les procédures de licenciement, instaurer un contrat de travail unique cassant les droits des CDI, réduire la durée d’indemnisation du chômage… -, et le MEDEF, en grande campagne sur le « poids » du Code du travail et «la peur d’embaucher » – prônant la fusion des instances représentatives du personnel et un contrat de travail incluant dès l’embauche des « motifs incontestables de licenciement » -, peuvent en revancher se réjouir. Le gouvernement s’apprête a satisfaire leurs désirs.
Les premières salves vont tomber dans la loi de « modernisation du dialogue social » qui sera présentée le 22 avril en Conseil des ministres, d’autres seront saupoudrées, dans les mois qui viennent, dans différents textes sous couvert d’« améliorer » la loi de sécurisation de l’emploi de 2013.
« FLEXIBILISER », ON CONTINUE AU MEPRIS DES DROITS DU SALARIE
La « flexibilisation» du marche du travail a déjà été bien entamée par la loi dite de «sécurisation» de l’emploi de juin 2013. Le texte gouvernemental commence par se féliciter des bons résultats de cette loi, qui a permis a de nombreux patrons d’enchainer les plans sociaux sans passer par la case justice. Le taux de recours au juge a l’issue des procédures de licenciements collectifs est ainsi passe de « 25 % avant le vote de la loi a 8 % », notent les auteurs. Le texte prévoit également la publication d’un bilan précis de la loi de juin 2013 et la présentation, dans la foulée, de nouvelles mesures destinées a « poursuivre la modernisation du marche du travail ». Objectif : « Mieux faire fonctionner les accords de maintien de l’emploi. » Aujourd’hui, ces accords (augmentation du temps de travail et/ou baisses de salaires contre maintien de l’emploi) sont réservés aux entreprises en difficultés. Les entreprises en bonne sante seront-elles bientôt concernées ?
LA DEGRESSIVITE PROGRAMMEE DES INDEMNITES DE CHOMAGE ?
Ce n’est qu’une phrase perdue dans un texte de 79 pages, mais elle a de quoi inquiéter. « La future convention d’assurance chômage définira, des 2016, des règles d’indemnisation plus incitatives au retour à l’emploi pour assurer la consolidation financière du régime. » « Inciter » les chômeurs à décrocher un boulot, a n’importe quel prix. Aujourd’hui, un demandeur d’emploi perçoit le même montant d’indemnités (57 % de l’ancien salaire brut) durant 2 ans (trois ans pour les seniors), sans diminution. La dégressivité, qui permet de faire baisser le montant dans le temps, est appliquée dans certains pays européens, comme l’Espagne, le Portugal ou l’ltalie. En France, elle a été mise en place entre 1992 et 1996. Le patronat rêve de son retour, pour faire pression sur les chômeurs. Les syndicats y sont opposes. Le gouvernement, beaucoup moins. Manuel Valls s’y était déclaré favorable en 2014, avant de faire machine arrière. Ce qui est sur, c’est que le déficit de l’UNEDIC (4,4 milliards d’euros attendus en 2015) sera brandi pour justifier cette nouvelle attaque contre les chômeurs.
A LA TABLE DU DIALOGUE SOCIAL, LE MENU SERVI PAR LES PATRONS
A chaque franchissement d’un seuil social (nombre de salaries présents dans l’entreprise), la loi accorde aujourd’hui aux travailleurs des droits nouveaux. Soit autant de « tracasseries » supplémentaires pour les patrons… Le MEDEF préconise la suppression pure et simple de ces seuils, ou, au moins, une fusion des différentes instances représentatives, pour mieux les asphyxier. Le texte que s’est procure l’« HD » évoque quelques pistes retenues par le gouvernement. Il est question de « rationalisation des obligations de consultation et de négociation » (en langage technocratique, « rationaliser » sonne mieux qu’« affaiblir »). Un projet de loi doit être présenté le 22 avril. Il prônera l’extension de la délégation unique du personnel (DUP), structure regroupant délégués du personnel et du comite d’entreprise. « Avantage » pour le patronat : la réduction du nombre d’heures de délégation. Par ailleurs, la fréquence des négociations obligatoires pourra être déterminée par accord d’entreprise. A quand les négociations salariales tous les trois ans.