Débat en commission autour de l'amendement "IBORRA"
Le débat en commission autour de l’amendement “Iborra”
En complément de notre article du 3 février Un amendement adopté en commission à l’Assemblée prévoit que les Régions seront responsables de l’accompagnement vers l’emploi. Sans Pôle emploi !, il nous semble intéressant de publier l’intégralité du débat en commission de l’Assemblée Nationale le 3 février en soirée préalablement à l’adoption de l’amendement porté par Monique Iborra qui vient d’être tardivement mis en ligne. Nous nous sommes permis d’y mentionner quelques réactions et précisions entre crochets
La Commission est saisie de l’amendement CL801 de la commission des Affaires sociales.
Mme Monique Iborra, rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales.
“Cet amendement ne contredit en aucune manière l’article que nous venons d’adopter ; il est d’une nature différente. Face au diagnostic partagé par tous, y compris le Gouvernement, d’un éclatement du service public de l’emploi, préjudiciable à l’efficacité de nos politiques publiques en ce domaine malgré les moyens importants qui leur sont consacrés, nous proposons ce qui nous semble représenter une solution plus opérationnelle que celle préconisée par le Gouvernement. Il s’agit de mettre en œuvre le droit à l’expérimentation, qui constituait un engagement du président de la République, repris par le Premier ministre dans une déclaration du 28 octobre 2014 au Sénat (voir “L’expérimentation en matière d’accompagnement vers l’emploi” n’est pas la régionalisation de Pôle emploi). Il affirmait alors être « favorable à de nouveaux transferts de compétence de l’État vers les régions en matière de développement économique, et à l’expérimentation en matière d’accompagnement vers l’emploi ».
Notre amendement décrit les conditions d’expérimentation, à savoir que l’État « peut » – et non « doit », comme le Sénat l’a écrit – confier aux régions, à leur demande et à titre expérimental, pour une durée de trois ans, la faculté de coordonner – il ne s’agit pas seulement de participer –, dans certaines conditions définies au niveau de l’État par une convention, le service public d’accompagnement vers l’emploi. Après consultation des régions expérimentatrices, le Gouvernement remettrait, avant le 31 décembre 2017, un rapport au Parlement portant sur l’évaluation de cette expérimentation et les suites qu’il entend y donner. L’expérimentation serait donc conditionnée à un accord de l’État – contrairement à ce que proposait le Sénat, à savoir un dispositif relevant du droit commun.
Notre amendement propose l’ouverture d’un droit permettant de décloisonner les politiques de l’emploi, de développer les compétences des demandeurs d’emploi en tenant compte du transfert de compétences au profit des régions en matière d’orientation et de formation professionnelle, de conditionner les aides aux entreprises au développement de l’emploi en liant ces deux compétences, et de rendre plus lisibles les politiques de l’emploi dans le cadre du service public de l’orientation et de la formation.
La région Midi-Pyrénées a réuni hier le premier CREFOP, qui a rassemblé entre 45 et 50 personnes – représentant uniquement la région concernée. Si, demain, les régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon fusionnent, nous allons nous retrouver avec un CREFOP censé être opérationnel mais rassemblant 100 à 120 personnes. [Curieuse conception de la fusion de deux régions qui entrainerait al multiplication par deux du nombre de membres d’une instance régionale, et nie donc que la fusion des régions n’a de sens que si elle entraine la fusion des organisations des acteurs économiques et sociaux. Ou alors il ne fallait pas voter la fusion entre Midi Pyrénées et Languedoc Roussillon, ce qui était d’ailleurs plutôt notre avis] Faire de nos régions des monstres technocratiques serait aller à l’encontre des objectifs que nous poursuivons, c’est pourquoi nous proposons une expérimentation bien encadrée par l’État. Il me paraîtrait inconcevable que le Gouvernement n’accueille pas favorablement notre proposition : ce serait tourner le dos à la modernité pour se replier dans l’archaïsme.
Mme la ministre. Les politiques de l’emploi décidées au niveau de l’État – je pense notamment aux contrats aidés ou aux emplois d’avenir, qui se justifient actuellement par le niveau élevé du chômage des jeunes, et qui n’ont pas vocation à durer indéfiniment – ne peuvent être effectivement mises en œuvre que grâce au levier que constituent les missions locales. L’État souhaite donc conserver les leviers de ce type, qui lui permettent d’appliquer – et parfois de changer – ses politiques. À défaut, c’est la région qui déciderait seule des politiques de l’emploi à mettre en œuvre localement, et nous n’aurions plus la possibilité de déployer des politiques d’État.
Pour le Gouvernement, l’expérimentation en la matière devait se limiter à un an ou deux : il s’agit là d’un dispositif différent de celui prévu par la Constitution, en vertu duquel une expérimentation considérée comme réussie à l’issue de la durée d’un mandat donne lieu à l’extension de la mesure concernée à toutes les régions. Je vous avais proposé, dans le cadre de l’examen de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM), d’opter pour un dispositif de délégation expérimentale de compétence afin d’échapper à la règle constitutionnelle, mais tel n’a pas été votre choix. En tout état de cause, il est bien certain que lorsque, au bout de deux ou trois ans, l’État ne veut plus conduire telle ou telle politique de l’emploi, cela peut poser un vrai problème si la région est d’un avis contraire. Je vois, dans l’amendement proposé par Mme Iborra au nom de la commission des Affaires sociales, une doctrine distincte de celle à laquelle se réfère le Gouvernement, et qui vient s’y heurter.
M. le rapporteur. J’estime que nous devons faire preuve de prudence en la matière, et qu’il importe de ne pas franchir la « ligne rouge » qui consisterait à déstabiliser Pôle emploi, établissement public né en 2008 dans des conditions difficiles et dont le fonctionnement aurait dû être amélioré. Les expérimentations proposées par Mme Iborra m’inspirent un sentiment partagé. D’une part, je rejoins Mme la ministre sur le fait que l’utilisation du mot « expérimentation » renvoie à l’acception constitutionnelle du terme, avec tous les effets liés à la forme que cela implique ; d’autre part, sur le fond, les délégations expérimentales ne peuvent fonctionner que dans le cadre d’un consensus au niveau du territoire. Je m’en remets donc à la sagesse de la Commission.
Mme Nathalie Appéré. Si notre rapporteur a raison de souligner que la déstabilisation de Pôle emploi serait très préoccupante au regard des missions qui lui sont confiées et des réorganisations que cet établissement a déjà connues, je veux souligner que l’amendement de Mme Iborra ne vise pas le pilotage de Pôle emploi, et que la « ligne rouge » en question n’est donc pas susceptible d’être franchie. Par ailleurs, les contrats aidés, auxquels Mme la ministre a fait référence, sont exclus de la rédaction de l’amendement. Le dispositif d’expérimentation proposé par notre collègue mérite d’être tenté car la mobilisation pour l’emploi implique que nous soyons innovants et audacieux, et que nous accordions donc aux territoires la capacité de s’organiser.
Dans la mesure où il est précisé que la stratégie en matière d’emploi continue d’être définie en lien avec l’État, et qu’il ne s’agit que de la faculté de confier une nouvelle compétence aux régions, au terme d’un dialogue aboutissant ou non à un contrat, le dispositif proposé est bien encadré. Il est vrai qu’il eût peut-être été plus judicieux d’évoquer une « délégation de compétence » au sens de l’article 2 de la loi MAPTAM – mais l’esprit est bien le même, à savoir celui d’une expérimentation. Certes, il est fait mention de la production d’un rapport, mais on peut difficilement éviter de passer par cette étape quand il est question d’une expérimentation, et le rapport produit nous permettra d’évaluer la pertinence du dispositif mis en œuvre. Pour notre part, nous sommes donc très intéressés par la mesure proposée par Mme Iborra.
M. Jean-Patrick Gille. C’est en fait d’un problème délicat, et qui se pose à nous depuis une vingtaine d’années, que nous débattons actuellement : comment rendre plus cohérent le service public de l’emploi dans les territoires et, comment améliorer l’accompagnement des demandeurs d’emploi ? La précédente majorité avait opté pour la création de Pôle emploi, résultant de la fusion de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) et du réseau ASSÉDIC en un grand service public ayant vocation à tout réorganiser. La fusion s’est révélée compliquée, surtout dans le contexte de crise qui s’est installé dans le même temps. Ce n’est pas faire injure à Pôle emploi de dire que cet établissement public ne répond pas aujourd’hui à toutes les attentes qui avaient été placées en lui, notamment en raison du caractère trop bureaucratique de son fonctionnement.
Au moment de procéder à une certaine décentralisation dans le domaine des politiques de l’emploi se pose la question de savoir jusqu’où la pousser, et comment la rendre aussi efficace que possible. La Commission a adopté plusieurs amendements du Gouvernement ayant pour effet de clarifier le texte en rétablissant certaines dispositions pour les rendre conformes à l’esprit de la loi du 5 mars 2014 sur la formation professionnelle : ainsi est-il précisé que le CREFOP est investi de la mission de définir la stratégie globale en matière de politique de l’emploi, tandis que l’État passe une convention – qu’il est important, à mon sens, de définir comme globale – avec l’ensemble des opérateurs, ce qui permet de désigner un lieu de concertation commun – à défaut du chef de file que certains préféreraient voir désigner.
Si l’amendement qui nous est proposé a vocation à aller dans le sens d’un renforcement du rôle des régions, je pense qu’il risque d’avoir l’effet inverse. En effet, à partir du moment où il est précisé qu’il ne concerne pas Pôle emploi,…
Mme la rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales. Je n’ai jamais dit ça ! [Elle l’a pourtant écrit dans son amendement dont les premiers mots sont “ Hors prérogatives de l’institution mentionnée à l’article L.5312-1″]
M. Jean-Patrick Gille. …il me semble que la reprise en main par les régions des missions locales et des maisons de l’emploi – c’est-à-dire uniquement des structures territoriales – présente un risque : celui de ne pas répondre à l’enjeu consistant à associer tous les acteurs concernés. Nous aurons d’un côté l’État et Pôle emploi, de l’autre les régions qui auront pris la main sur l’ensemble des réseaux territoriaux. Au lieu de procéder à une coordination du dispositif, nous l’aurons scindé en deux ! J’ajoute que, en l’état actuel, les réseaux territoriaux sont en partie financés par les collectivités locales et que, dans le cas d’une mainmise des régions sur ces réseaux, les autres collectivités vont avoir la tentation de mettre fin à leur participation.
S’il n’est pas simple de résoudre ce problème, je demeure persuadé de l’importance de ce que ce que nous avons voté à l’article précédent. Je persiste à considérer que la région doit être vue comme la collectivité organisatrice des parcours professionnels – la question consistant à déterminer si le président de région a vocation à piloter les expérimentations restant posée, de même que celle des transferts de crédits.
En tout état de cause, je ne peux soutenir un amendement ne prenant pas en compte le sort de Pôle emploi. En effet, en tant qu’élus locaux, nous savons tous à quel point il est difficile d’influer sur son fonctionnement afin d’accentuer la territorialisation de la politique de l’emploi. C’est dans ce domaine que nous devons trouver le moyen d’avancer.
Mme la rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales. Notre amendement précise bien que les régions expérimentatrices s’occuperont de la coordination des acteurs régionaux, à l’exception des politiques nationales auxquelles se rattachent les contrats aidés et les crédits d’accompagnement afférents à ces dispositifs. Votre argument selon lequel le Gouvernement doit conserver des leviers lui permettant d’assurer la mise en œuvre des politiques nationales au niveau local n’est donc pas fondé, madame la ministre. J’ai tenu compte, pour rédiger cet amendement, des discussions que nous avons eues avec le ministre du Travail, de l’emploi et de la formation professionnelle ainsi que des craintes qu’il a exprimées au sujet des politiques nationales de l’emploi et en particulier des emplois aidés : le dispositif qui vous est proposé ne vise donc pas ces politiques.
Pour ce qui est de l’argumentation de M. Gille, qui s’est exprimé en sa qualité de président de l’Union nationale des missions locales, [affirmation pour le moins surprenante de la part d’une députée vis à vis d’un des ses collègues qui est au même titre qu’elle un élu de la République] je rappelle qu’à l’heure actuelle, un tiers des crédits de fonctionnement proviennent de l’État, un tiers des régions et un tiers des autres collectivités [Le rapport d’activité du CNML 2012, dernier à mentionner les données financières mentionne que les subventionnements des conseils régionaux, hors fonds gérés sont de 18,5 %, et de 13,1 % pour Midi Pyrénées, région dont Monique Iborra est l’élue, ce qui est fort loin du tiers annoncé] . De ce point de vue, l’État est donc minoritaire, et il ne devient majoritaire qu’à partir du moment où l’on comptabilise les contrats aidés, à savoir les contrats d’avenir et la « garantie jeunes » – des dispositifs exclus du champ d’application de notre amendement.
En ce qui concerne Pôle emploi, il est évident que vouloir décentraliser du jour au lendemain un établissement si centralisé ne serait pas efficace et poserait de sérieux problèmes d’organisation. Il est faux de dire que nous ne nous intéressons pas à Pôle emploi qui, en plus d’être l’outil de l’État, reste le partenaire principal des régions et des autres collectivités locales. L’argumentation de M. Gille ne tient donc pas compte de la réalité de ce que je propose et de ce qui se passe sur les territoires.
Pour toutes ces raisons, je maintiendrai mon amendement.
Mme la ministre. Vous dites, madame Iborra, que votre amendement ne concerne pas les enveloppes spécifiques des contrats aidés. Mais il faut bien faire fonctionner les missions locales et, dans le dispositif que vous proposez, les crédits de l’État aux missions locales sont transférés à la région. Le ministre du Travail, de l’emploi et de la formation professionnelle ayant estimé qu’il devait disposer de davantage d’opérateurs afin de mettre en œuvre dans les meilleurs délais les contrats aidés dont il a récemment été décidé d’augmenter le nombre, nous avons cherché par quels moyens permettre aux opérateurs locaux de compenser ce qu’il faut bien voir comme une insuffisance des opérateurs de l’État, notamment Pôle emploi.
Notre idée a consisté à aider ponctuellement les opérateurs locaux lors des situations de crise, qui peuvent être circonscrites à un lieu donné : ainsi peut-on décider de mettre un peu plus de moyens en tel ou tel point du territoire – c’est malheureusement nécessaire en ce moment dans le Finistère – afin de permettre à des demandeurs d’emploi de se reconvertir rapidement. Force est de reconnaître que, depuis la fusion entre l’ANPE et le réseau des ASSÉDIC, l’État ne dispose plus de ce levier décentralisable que constituait l’ANPE. Dans cette situation, l’une des solutions consiste à faire travailler Pôle emploi avec des missions locales en certaines occasions particulières, par exemple lorsqu’il s’agit de relancer des contrats aidés ou des conventions de reclassement personnalisé (CRP) : allouer un peu de plus de crédits de fonctionnement dans ces occasions particulières constitue un levier direct dont dispose l’État pour agir sur certaines missions locales. Enfin, les régions gérant la participation de l’État dans le fonctionnement des missions locales, on peut se demander quelle va être la réaction des autres collectivités.
De façon assez surprenante après ce débat la Commission adopte l’amendement CL801.
Nous sommes pour notre part convaincus, comme nous l’avons écrit dans Régionalisation du Service Public de l’Emploi : des amendements contradictoires adoptés en commissions à l’Assemblée Nationale que cet amendement est contradictoire avec ceux qui ont été adoptés à l’article précédent à partir des propositions du gouvernement. En tous cas, nous affirmons que le débat politique ne gagne pas à se fonder sur des affirmations contraires aux textes que l’on signe, sur la mise en avant de chiffres faux et sur des mises en cause personnelles
A suivre lors de la séance plénière
AJOUT
Le compte rendu intégral du débat sur cet amendement en commission des affaires sociales
Après l’article 3 bis
La Commission se saisit de l’amendement AS16 de la rapporteure pour avis.
Mme la rapporteure pour avis. En matière de lutte contre le chômage, il est important de trouver de nouvelles solutions. Le Sénat a proposé que les régions exercent des compétences supplémentaires en matière d’emploi ; il est allé jusqu’à prévoir une inclusion de Pôle emploi, de façon plus ou moins claire, dans les politiques régionales.
À mon sens, Pôle emploi doit rester un acteur national. Son action ne doit pas être coordonnée par les régions. Mais nombre de rapports – du Parlement, de l’inspection générale des affaires sociales ou de la Cour des comptes – ont montré un éclatement et une mauvaise coordination des différents acteurs du service public de l’emploi. L’État, il faut le reconnaître, n’a plus les moyens de ses ambitions.
Dès lors, je propose, non pas une régionalisation d’emblée comme l’a fait le Sénat, mais une expérimentation : certaines régions se verraient confier, pour trois ans, le service public d’accompagnement de l’emploi, en accord avec les propos du Premier ministre qui s’est dit le 28 octobre dernier au Sénat « favorable à de nouveaux transferts de compétences de l’État vers les régions en matière de développement économique, et favorable à l’expérimentation en matière d’accompagnement vers l’emploi ». Il ne s’agit pas ici de transférer aux régions l’ensemble du service public de l’emploi, mais bien d’engager une meilleure coordination des différents intervenants, de clarifier et de simplifier.
Les politiques nationales, comme les contrats aidés, demeureraient du domaine exclusif de l’État.
Au bout de trois ans, le Gouvernement remettrait un rapport dressant le bilan de ces expérimentations.
Mme Bérengère Poletti. Cette suggestion d’expérimentation me semble très séduisante. Pourquoi en écarter les contrats aidés, qui constituent un instrument très important des politiques de l’emploi ?
Mme la rapporteure pour avis. Les emplois d’avenir et la garantie jeunes sont des dispositifs de l’État, qui en assure le financement et la mise en œuvre. Je souhaite respecter les compétences de l’État.
M. Gérard Sebaoun. Cap emploi n’est-il pas lié directement à Pôle emploi ?
Mme la rapporteure pour avis. Non, Cap emploi a une existence propre.
M. Gérard Sebaoun. L’amendement prévoit le transfert « des crédits affectés, hors contrats aidés et crédits d’accompagnement afférents à ces dispositifs ». De quels crédits s’agit-il précisément ?
Mme la rapporteure pour avis. Les contrats aidés ne seraient pas transférés aux régions, en effet.
Prenons le cas des missions locales : aujourd’hui, l’État intervient, mais aussi les régions, les départements et parfois les intercommunalités. Les financements de l’État ne sont donc pas majoritaires. Ils ne le deviennent que si l’on ajoute aux crédits de fonctionnement les crédits correspondant aux contrats aidés.
M. Gérard Sebaoun. Les départements interviennent souvent pour financer les écoles de la deuxième chance. En confiant celles-ci aux régions, ne prenez-vous pas le risque que les départements se désengagent ?
Mme la rapporteure pour avis. Ce sera à la discrétion de chacun. Les départements pourront continuer de financer les écoles de la deuxième chance, mais le premier financeur doit à l’évidence être la région.
M. Gérard Bapt. J’ai assisté ce matin au conseil d’administration de la Maison commune emploi formation, que vous connaissez mieux que personne, madame la rapporteure pour avis. Ses membres craignent un démantèlement de Pôle emploi. Ils sont prêts à établir des partenariats. Mais Pôle emploi doit demeurer bien présent dans les régions : il l’est déjà souvent dans les structures locales.
Mme la rapporteure pour avis. Absolument. Vous pourrez les rassurer : Pôle emploi restera l’opérateur majeur de l’État et demeurera bien présent dans les régions. L’expérimentation que je propose ne remettra pas cela en cause. Contrairement au texte issu du Sénat, qui laisse entendre que les régions pourraient coordonner l’action de Pôle emploi, j’exclus la coordination par les régions de l’opérateur national que Pôle emploi doit demeurer.
Mme Sylviane Bulteau. L’expérimentation est quelque chose d’assez nouveau, et cette proposition me semble très séduisante. Le Parlement fait des lois qui s’appliquent à tous, mais il faut apprendre à tenir compte des spécificités de chaque territoire.
J’entends d’ailleurs avec grand intérêt que certains départements financent les écoles de la deuxième chance : ce n’est pas le cas dans mon propre département, qui finance ses propres structures, ce qui est regrettable, car on y perd en efficacité, et les dépenses sont plus importantes.
Il faudra également travailler sur la mobilité des demandeurs d’emploi, des salariés, des jeunes, qui représente un vrai problème dans notre pays.
Mme la rapporteure pour avis. Une telle expérimentation me semblerait en effet enrichissante pour tout le monde. Si la réforme territoriale créait des monstres technocratiques, si elle aboutissait à multiplier les longues réunions au bout desquelles chacun décide de mettre en place sa propre politique séparée, alors nous aurions échoué. Avoir plusieurs pilotes, c’est ne pas en avoir du tout.
Je comprends que tout le monde n’est pas prêt à décentraliser la politique de l’emploi, mais un refus de l’expérimentation me paraîtrait archaïque, et contradictoire avec les objectifs affichés par le Gouvernement.
La Commission adopte l’amendement.
Notons que pour établir son avis, la rapporteure a auditionné seulement trois personnes
Ø Ministère du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social – Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) – Mme Emmanuelle Wargon, déléguée générale à l’emploi et à la formation professionnelle
Ø Assemblée des communautés de France (AdCF) – M. Charles-Éric Lemaignan, président
Ø Territoires urbains (Association des communautés urbaines de France (ACUF) et Association des maires de grandes villes de France (AMGVF))
Quel souci d’écoute avant de proposer !
http://alternatives-economiques.fr/blogs/abherve/2015/02/10/le-debat-en-commission-autour-de-lamendement-iborra/