AEF INFO : Ce que souhaite le MEDEF

 

 

"Les candidats doivent se positionner pour favoriser l’entreprise et le développement économique", déclare Geoffroy Roux de Bézieux, lundi 24 janvier 2022. Deux mois après une première alerte sur le silence des divers candidats à l’élection présidentielle vis-à-vis de la question économique, le président du Medef reste sur sa faim. Reprenant l’adage selon lequel on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même, l’organisation patronale énonce ses priorités et formule une série de propositions pour le prochain quinquennat. "Cinq grands défis sont à relever", résume Geoffroy Roux de Bézieux. Ce sont les défis de la mondialisation, des transitions écologiques et numériques, de la compétitivité, de la capacité à produire sur le territoire et, "la plus compliquée", à savoir celle de la "montée en compétences".

FORMATION PROFESSIONNELLE

 

"Le système scolaire en France a longtemps été un modèle permettant la mobilité sociale, mais aujourd’hui, la formation professionnelle initiale et continue sont des 'Talons d’Achille' du pays dans la compétition mondiale", considère le Medef. Outre un retour sur la "réforme Blanquer" pour réinstaurer des heures d’enseignement de mathématiques, une meilleure orientation ou un nouveau rapprochement entre le système scolaire et l’entreprise, Geoffroy Roux de Bézieux préconise de "porter le nombre d’alternants en stock à 2 millions d’ici la fin de la mandature". Cet objectif est à comparer avec les quelque 1,5 million actuels : 600 000 apprentis, 100 000 contrats de professionnalisation et 700 000 jeunes alternants sous statut scolaire dans les lycées professionnels.

 

Cet objectif de 2 millions d’alternants coûterait 2 milliards d’euros de plus, portant le budget global affecté de 8 à 10 milliards par an. Dans la droite ligne de l’Acni du 14 octobre dernier, le Medef considère qu'"un élargissement des recettes et une meilleure allocation des fonds permettraient de mobiliser plus de 1 milliard d’euros par an dans le financement de l’alternance". Cela passerait par la fin des "exonérations de taxe d’apprentissage dont bénéficient certains secteurs d’activité [+700 millions d’euros de recettes pour France Compétences]", par l’arrêt de "l’affectation en apprentissage d’élèves qui devraient poursuivre leur parcours au sein de l’Éducation nationale [-160 à -210 millions d’euros de dépenses évitées]", par la révision de "l’ensemble des coûts-contrats [avec comme cible des économies de l’ordre de 10 % par rapport à aujourd’hui]" ou encore par la réduction des "coûts-contrats versés aux CFA et autres organismes de formation recevant déjà des fonds publics par ailleurs [-100 millions d’euros de dépenses]".

 

Parallèlement, le Medef demande aux pouvoirs publics de "pérenniser le soutien financier public mis en place en 2020 pour les alternants, qui a été très efficace, quitte à recalibrer les montants en fonction des besoins effectifs de chaque filière".

Toujours en matière de formation professionnelle, "sans nier que la réforme de 2018 a eu l’effet d’un coup de boost, il y a des excès à corriger sur le CPF [et] il faut remettre de l’ordre dans tout cela", explique Geoffroy Roux de Bézieux. Le CPF devrait "être mobilisé en priorité vers les compétences attendues sur le marché du travail". Pour ce faire, il faudrait "instaurer la codécision entre le salarié et l’employeur sur l’utilisation du CPF, afin d’orienter cette utilisation vers les formations répondant aux besoins des entreprises". Ce principe de codécision pourrait ne porter que sur une partie du CPF, nuance le leader patronal. Cette maîtrise du CPF permettrait notamment de limiter la dérive financière de France Compétences, étant entendu que, pour le Medef, il n’est pas question de modifier le niveau de cotisations consacrées à la formation. Par ailleurs, l’organisation réitère sa revendication visant à ne plus faire financer la formation des chômeurs par les entreprises.

Par ailleurs, s’il ne souhaite pas remettre en cause le principe du dispositif "Transition professionnelle", le président du Medef reconnaît que le dispositif coconstruit de manière tripartite est "extrêmement compliqué" et qu’il est aujourd’hui nécessaire de "reprendre le chantier", tant l’enjeu des reconversions est et sera important dans les prochaines années.

EMPLOI

Outre la nécessité d'améliorer l’accompagnement des demandeurs d’emploi et des entreprises" et de faire mieux connaître les aides à la mobilité proposées par le service public de l’emploi, "nous recommandons de régionaliser Pôle emploi", avance Geoffroy Roux de Bézieux, précisant que cette mesure est "fortement demandée par les adhérents du Medef". "Je ne dis pas que Pôle emploi est une catastrophe, mais nous avons des retours très hétérogènes suivant les branches et les territoires. Mais, il y a le sentiment que les problématiques de l’emploi sont régionales et territoriales", précise le président du Medef.

 

En pratique, cette régionalisation ne se ferait "non pas en découpant l’établissement en autant de structures régionales qui seraient ensuite rattachées aux conseils régionaux, mais en développant une logique de contractualisation par objectifs entre les directions régionales de Pôle emploi et leurs parties prenantes locales : conseils régionaux, représentants des entreprises [Medef régionaux, chambres consulaires…]". Et de préciser qu’il n’est question de régionaliser que les politiques de placement et non pas l’indemnisation des demandeurs d’emploi.

En matière d’indemnisation, le Medef veut "évaluer objectivement l’impact de la réforme des règles d’indemnisation sur le retour à l’emploi instaurée fin 2021". "Cette évaluation doit nous permettre de réviser, le cas échéant, certains curseurs de la réforme", avance l’organisation patronale. Si elle maintient son soutien aux nouvelles règles de calcul des allocations chômage, l’organisation patronale confirme son opposition totale à la mise en place du bonus-malus, dispositif qualifié de "délétère pour la création d’emploi dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre".

Plus globalement, le Medef réitère sa proposition de mettre en œuvre une "nouvelle architecture du système", avec un système à deux étages. Il faut aussi "sécuriser financièrement le régime avec, d’une part, la reprise par l’État de la dette induite par ses propres décisions et, d’autre part, l’instauration d’une règle d’or d’équilibre de moyen terme [5 ans] pour la partie assurantielle dont les partenaires sociaux auraient la responsabilité, les excédents des bonnes années finançant les creux en cas de repli conjoncturel".

Par ailleurs, l’organisation considère que "les revenus de solidarité doivent être impérativement associés à un accompagnement vers l’emploi, afin d’éviter le maintien dans la pauvreté ; mais ils doivent aussi être plafonnés en additionnant tous les minima sociaux qu’un foyer fiscal peut recevoir, afin d’éviter que les revenus de remplacement n’excèdent les revenus du travail".

 

DIALOGUE SOCIAL EN ENTREPRISE

 

Sans surprise, en ce qui concerne les ordonnances Travail de septembre 2017, "nous avons un diagnostic totalement différent de ceux des organisations syndicales et nous considérons que c’est une très grande réussite", souligne Geoffroy Roux de Bézieux."Il est nécessaire de laisser aux acteurs sociaux le temps de s’habituer à ces nouvelles règles", avance le Medef et au-delà, l’organisation patronale considère qu’il faut "parachever les ordonnances" en allant plus loin.

 

Ainsi, faudrait-il "élargir globalement le champ des négociations possibles dans les entreprises et les branches à d’autres domaines pour couvrir l’ensemble des sujets concrets rencontrés sur le terrain [par exemple : la conclusion et la rupture du contrat de travail, les congés imposés, la possibilité de fractionner le temps de repos quotidien de 11 heures minimum, etc.] sans formalisme excessif". De plus, il faudrait "clarifier l’articulation entre les règles de droit public et ce qui peut être adapté par la négociation de branches ou d’entreprises", via une "réécriture partielle du code du travail" et un "plan d’accompagnement des acteurs".

 

TEMPS DE TRAVAIL

Il faudrait "renforcer les marges de manœuvre existantes pour augmenter la durée annuelle sans nécessairement revenir sur la durée légale hebdomadaire du travail, afin de pouvoir faciliter le recours aux forfaits jours par l’employeur en vertu de son pouvoir de direction". "Cette organisation du travail, entrée dans les pratiques courantes, doit pouvoir être mise en place sans négociation d’un accord d’entreprise, en incluant des mesures forfaits jours dans la partie supplétive du code du travail", considère le Medef.

Et de proposer de développer les Comptes épargne temps, actuellement plutôt présents dans les grandes entreprises. "Sa mise en place doit être encouragée et facilitée pour les TPE, PME et ETI notamment." Au-delà, il faudrait "encourager les salariés à monétiser une plus grande part de leur CET afin d’accroître la durée du travail et leur pouvoir d’achat, en déplafonnant la limite légale actuelle et en défiscalisant la monétisation des RTT". Le Medef rappelle que "la loi permet de monétiser les jours placés dans le CET sauf ceux issus de la 5e semaine de congés payés" et estime que "tous les jours placés en CET, sans exception, devraient pouvoir être monétisés par le salarié", laissant ainsi entendre la fin de la 5e semaine de congés payés obligatoire.

POUVOIR D’ACHAT

"En rendant plus compétitif l’emploi qualifié en France, où la part de revenu disponible pour le salarié décroît rapidement sous l’effet des charges sociales et de l’impôt sur le revenu : il est donc indispensable de réduire progressivement les charges sur les salaires supérieurs à 2,5 fois le Smic", avance l’organisation qui plaide pour une baisse de 20 % des "charges sociales salariales sur les emplois entre 2 et 4 fois le Smic". Sur la question des trappes à bas salaires liées aux effets combinés des hausses de salaires et des dispositifs d’allégements de cotisations, Geoffroy Roux de Bézieux explique n’avoir "pas trouvé de solutions" et "le regrette". "Cela demeure un problème", ajoute-t-il.

"Le partage de la valeur créé par l’intéressement et la participation est un très fort levier et unique au monde pour associer les salariés au développement et à la transformation de leur entreprise, mais il ne concerne aujourd’hui que la moitié des salariés du secteur privé", explique le Medef. En la matière, l’organisation préconise "la suppression du forfait social pour toutes les entreprises sur l’intéressement [seules les moins de 250 salariés sont exonérées aujourd’hui] et pour les entreprises de moins de 250 salariés sur la participation [seules les moins de 50 salariés sont exonérées aujourd’hui]. De plus, est proposée "la pérennisation de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat sans charge ni impôt sur le revenu pour les salariés d’entreprises de moins de 50 salariés".

Le Medef souhaite "favoriser la distribution d’actions gratuites défiscalisées pour les entreprises de moins de 250 salariés en supprimant la contribution patronale payée par l’entreprise au moment de l’acquisition des actions" et "créer une alternative aux actions gratuites, par un instrument indexé sur le cours de l’action" afin d’éviter notamment la dilution du capital.

Plus structurellement, le Medef propose de "créer un tronc commun à l’ensemble des dispositifs sous la forme d’un 'Plan d’association aux résultats'". "Ce plan d’association permettrait aux entreprises et à leurs salariés d’opter parmi trois grandes options correspondant aux dispositifs actuels : [l’intéressement] en fonction de la croissance/performance ; [la participation] en fonction des bénéfices nets ; ou pour développer l’actionnariat salarié".

PROTECTION SOCIALE

En ce qui concerne les retraites, le Medef propose une réforme paramétrique et une réforme systémique. La réforme paramétrique consiste en une "augmentation progressive [3 mois par an] de l’âge légal de 62 à 65 ans [recettes attendues d’environ 24 milliards d’euros par an à terme], tout en continuant à permettre des départs anticipés pour les carrières longues et les métiers à forte pénibilité". Parallèlement, sont demandées, "l’accélération et l’amplification de la réforme de 2016 en conditionnant le taux plein à 44 annuités contre 42 aujourd’hui [+5 milliards d’euros de recettes annuelles à terme]". Sur le plan systémique, le Medef confirme son souhait de voir la suppression des 42 régimes actuels, remplacés par trois régimes : un pour les salariés, un pour les agents publics et un pour les indépendants.

 

En ce qui concerne la perte d’autonomie et la dépendance, le Medef confirme sa position selon laquelle ces risques n’ont pas vocation à être financés "par le travail, mais par la solidarité nationale" via la CSG ou la TVA.

Enfin, il faut "préserver notre modèle de protection sociale reposant sur la Sécurité sociale et sur les organismes complémentaires". "La 'Grande Sécurité sociale' est une illusion inutile alors qu’existent des acteurs diversifiés publics, privés ou mutualistes contribuant à la couverture maladie complémentaire et à la prévoyance des Français, qui doivent être gérés selon les meilleurs standards d’efficacité", considère le Medef

 

Source : https://www.aefinfo.fr/

 

 



04/02/2022
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi



Recommander ce blog | Contact | Signaler un contenu | Confidentialité | RSS | Espace de gestion