Le nombre d’emplois vacants est un sujet privilégié des affirmations des politiques et des responsables patronaux. En annoncer un nombre élevé permet quand on est dans l’opposition de fustiger un  gouvernement incapable de faire face à ce qui ne peut être qu’une gabegie complète, et quand on gouvernement de justifier les mesures que l’on va prendre. Et pour le patronat l’avantage est double, mettre en cause le trop généreux système d’indemnisation du chômage qui n’incite pas à reprendre un emploi et demander de nouvelles mesures facilitant l’embauche

Nous avons, à maintes reprises dans ce blog relevé les chiffres lancés à la cantonade par les uns et les autres : Nicolas Sarkozy, de loin le plus généreux, avec 500 000 (voir 500 000 emplois non pourvus, 164 789 offres disponibles à Pôle emploi : cherchez l’erreur et Le retour des 500 000 emplois non pourvus), ce que Marc Landré journaliste spécialiste au Figaro des questions d’emploi en 2011 qualifia de “chiffre pifométrique et fantasmagorique” mais aussi François Hollande, plus prudent  mentionnant entre 200 000 et 300 000 (voir Combien d’emplois non pourvus ? Une approche prudente de François Hollande), mais aussi le MEDEF affirmant  “ il existe aujourd’hui dans notre pays 400 000 emplois non pourvus”  (voir 200 000, 300 000 , 400 000, 500 000, 600 000 emplois non pourvus) le dernier en date étant le ministre du Travail François Rebsamen mentionnant pour sa part 350 000 emplois non pourvus (voir Où François Rebsamen a-t-il trouvé les 350 000 emplois non pourvus ? En tous cas, pas à Pôle emploi). Le record reste à un animateur de radio, Jean-Marc Morandini qui a réussi à faire toute une émission autour d ‘un chiffre issu des difficultés escomptées de recrutement un trimestre froidement multipliés pour obtenir un chiffre annuel permettant l’interrogation claironnée ”Les chômeurs veulent-ils vraiment travailler ?”
(voir 600 000 emplois vacants ! De l’art de faire du buzz avec des chiffres virtuels)

La parution de l’étude  Dares Indicateurs N°59 datée d’août 2015 et signée par Philippe Bourieau nous permet de réfléchir avec des chiffres sérieux, résultant d’une définition précise, internationalement reconnue  ” un emploi dit «vacant» est un poste libre (nouvellement créé ou inoccupé) ou encore occupé et sur le point de se libérer, pour lequel des démarches actives sont entreprises pour trouver, à l’extérieur de l’établissement, le candidat adéquat dans l’immédiat ou dans un avenir proche” et d’une méthode d’enquête éprouvée dans la durée, trimestrielle pour les entreprises de plus de 10 salariés, annuelle pour les entreprises de moins de 10 salariés

Plusieurs  enseignements principaux sont à tirer des données publiées

• Dans les entreprises de plus de 10 salariés le nombre de ces emplois vacants est globalement stable entre 2010, 74 000, et 2014, 72 800, et durant quatre ans, ils n’ont jamais varié de plus de 10 000 en plus ou en moins de ces chiffres, ce qui traduit une grande stabilité du phénomène
• Le dernier nombre total connu, fin 2013, en intégrant les entreprises de moins de 10 salariés, atteint 138 900, très loin des chiffres annoncé, et même en légère baisse depuis l’année précédente
• Les grandes entreprises ont un taux de postes vacant beaucoup moins élevé que les petites, et en baisse, ce qui tendrait à montrer que les postes vacants se réduisent par une gestion prévisionnelle et une anticipation des procédures de recrutement que les grandes entreprises ont plus de possibilité de faire que les TPE.

En résumé des enseignements de cette étude, il vaudrait mieux aider les TPE et PME à développer l’analyse prospective de leurs besoins et à anticiper les procédures de recrutements. Mais aller intéresser les médias avec cela ! Alors nous aurons surement d’autres chiffres effrayants annoncés. Qui sera le premier à annoncer le million d’emplois vacants ? Les paris sont ouverts

http://alternatives-economiques.fr/blogs/abherve/2015/08/11/9887/